COMMENTAIRES DE LA LEçON 2

- Es aquí, veses? Ne passa un cada cinc minutas. Languiràs pas longtemps. 

NOTER:

"veses", du verbe "veire", voir. Voici ce verbe à l'indicatif présent, avec sa prononciation. 

vese veses vei vesèm vesètz veson ze zes i bézènzès zou je vois
tu vois
il voit
nous voyons
vous voyez
ils voient

"Ne passa un cada cinc minutas"="il en passe un toutes les cinq minutes". "Ne", adverbe pronominal, est le français "en". La langue populaire disait plutôt "ne'n". La langue normtive recommande "ne". Ex: "ne vòle", j'en veux; Ne s'élide selon son voisinage: "n'auràs", tu en auras; "n'i a" = il y en a; "pòrta me'n una caissa"=apporte-m'en une caisse. "los ne tirarem", on les en tirera; "anatz-vo'n"=allez vous-en. 

"Cada"=chaque. Est invariable :  "Cada garçon e cada filha". Le montpelliérain parlé et écrit au XIX° et au XX° siècle employait le gallicisme "chaca". 

"Languiràs": 2° personne de l'indicatif futur de "languir", verbe resté très vivant dans le français courant dans le sens de s'ennuyer ou s'attrister à attendre: "je languis que ça soit fini", "il me fait languir, il arrive jamais", "elle se languit de son petit ami qui est en voyage", etc... Tout cela est incorrect en français et parfaitement correct en occitan: "me languisse qu'aquò siágue finit, me fai languir, jamai arriba pas, se languís de son jove qu'es en viatge...." "Lo languiment", c'est la mélancolie au sens romantique.  Ce futur se construit très classiquement:

languirai languiràs  languirà languirem languiretz languiràn je m'attristerai à attendre            tu t'attristeras à attendre
il s'attristera à attendre
nous nous attristerons à attendre
vous vous attristerez à attendre
ils s'attristeront à attendre

 

- Demòras embé ieu, dau temps qu'esperarai sa venguda?

NOTER:

"Demòras", deuxième personne de l'indicatif présent du verbe "demorar", rester, demeurer. Verbe qui se conjugue sur "parlar", parler (1° conjugaison). Attention, cette conjugaison ne se prononce pas chez nous comme on l'écrit de façon normalisée. "Demòras" se dit "demòres", comme d'ailleurs dans toute la Provence, mais l'écrit n'en tient pas compte.  

demòre demòras  demòra demoram demoratz demòran démòre
dém
òres
dém
òra
démou
ran
démou
ràs
démòrou
je reste
tu restes
il reste
nous restons
vous restez
ils restent

Ce serait exactement pareil pour le verbe pris comme "paradigme", "parlar" présenté ci-dessous. C'est une des conjugaisons les plus communes. 

parle parlas  parla parlam parlatz parlan pàrle
pàrles
pàrla
par
lan
parlàs
pàrlou
je parle
tu parles
il parle
nous parlons
vous parlez
ils parlent

"embé", avec, noté "amb" en langue normative (voir leçon 1). On aurait pu dire aussi "emb ieu", adouci en em'ieu.  

"dau temps", du temps. "dau" est l'article contracté français "du". La forme normative languedocienne est "del", mais à Montpellier et dans toute la Provence c'est "dau" (qui se prononce daw/dòw, et que les Provençaux notaient "dóu"). On trouve "del" en Lodévois et dans les hautes garrigues, où sa pronciation s'adoucit en "déi". 

"esperarai" indicatif futur 1° personne du singulier du verbe "esperar" dont le premier sens est "attendre". Un "esperatge" en Camargue c'est "l'attente aux fers" où le gardian corrige un taureau récalcitrant en lui appliquant sur les naseaux les trois pointes de son trident. Un "esperenc", c'est un affût de chasseur où l'on attend le passage du gibier, etc...

Esperar se conjugue comme parlar, comme présenté à la leçon 1: voici son futur de l'indicatif et celui de parlar. Pas de piège phonétique, simplement -am et -atz qui s'adoucissent comme de coutume en -àn et _às. 

esperarai esperaràs esperarà esperarem esperaretz esperaràn parlarai parlaràs parlarà parlarem parlaretz parlaràn

 

 - Nò. Volriái ben, mès ai pas lo temps. Trabalhe, ieu, siái pas coma tus. 

NOTER:

"Nò", non. Propre à Montpellier, archaïsme probable. On dit plus généralement "non" (prononcer "noun"). 

"volriái" (prononcer "vourrièy", "vouyèy"), "je voudrais", conditionnel du verbe "voler", vouloir. Il se conjugue en accord parfait avec la "norme"; seule particularité: la phonétique escamote un peu le groupe de lettres "lri"...

volriái volriás  volriá volriam volriatz volrián bourrièy/bouyèy
bourriès/bouyès
bourriè/bouyè
bourrian/bouyan
bourrias/bouyas
bourrièn/bouyèn
je voudrais    tu voudrais
il voudrait
nous voudrions
vous voudriez
ils voudraient

"ben" (prononcer "bé"=bien). A Mtp et en Provence on préfère cette tournure à "volriái plan" qui aurait le même sens, et est majoritairement employé dans tout le reste du Languedoc dès qu'on franchit le lit de l'Hérault. 

"Mès", rappelons le (leçon 1) s'écrit officiellement "mas" et se prononce à Mtp  exactement comme le "mais" Français. 

"ai", j'ai; "siái" ou "soi", je suis, voir leçon 1.

"ieu"=moi. "tus", toi. Comme en Italien, en Catalan ou en Espagnol, le pronom personnel ne s'emploie que pour insister sur la personne, pas pour désigner celle-ci dans la conjugaison comme en Français, ou Anglais, ou en Créole. Voici la liste de ces pronoms:

1° pers sing
2° pers sing
3° pers sing
1° pers plur
2° pers plur
3° pers plur
ieu (pron. "yèw"), moi
tus, tu (pron. "teus, teu"), toi
el, ela (pron. él, éla), il, elle
nos (pron. "nouss"), nous
vos (pron. "bouss"), vous
eles, eles (pron. éles, élas), eux, elles

"Tus" est propre au Mtp, la forme générale, connue aussi à Mtp, es "tu". On peut y rajouter aux 2° et 3° personnes du pluriel "nosautres" e "vosautres", souvent raccourcies familièrement en "nautres e vautres"

 

- Diga, bogre de colhon, m'agrada pas que me parles coma aquò. Un trabalh, ieu tanben aimariái de n'avere un. 

NOTER:

Les injures

"Bogre de colhon", espèce d'imbécile. On a un grand choix. On aurait pu dire: "traça de pifre", "innocent", "innocent d'Aniana", "abestit", "sòt-bogre", "bogre d'ase", "grand nèci"...

L'impératif. 

"Diga", dis. C'est l'impératif du verbe dire. "Disons" se dirait "Diguem". "Dites" se dirait "Digatz". Voici l'impératif pour les 3 conjugaisons regulières: parlar (parler); legir (lire); rendre (rendre)

parla
parlem
parlatz
legís
legiguem
legissètz
rend
rendem
rendetz

Voici la prononciation montpelliéraine:

parla
parl
én
parl
às
tchís
létchi
guén
létchis
sèss
rén
rend
én
rend
és

Voici les formes "normatives". Ce sont les mêmes sauf pour la 1° personne du pluriel qui est en fait un subjonctif. Comme nous le verrons, la norme revient aux subjonctifs classiques un peu archaïsants du XVII° siècle dont la désinence pour la 2° et la 3° conjugaison est en -a. 

parla
parlem
parlatz
legís
legigam
legissètz
rend
rendam
rendètz

Le subjonctif présent

"m'agrada pas que me parles". Le verbe "parlar" est ici au subjonctif présent. "Ce mode marque fondamentalement que ce que le verbe évoque ne relève pas de la réalité, n'y a pas d'incidence ou est envisagé d'abord à travers une attitude subjective" (Sauzet p 28). Joanon en employant ce mode veut donc dire que son interlocuteur pourrait lui parler sur un autre ton. Si c'était une constatation il emploierait l'indicatif. Le subj. peut donc marquer la volonté, l'obligation (il faut qu'il vienne=cau que vengue), le doute (ça m'étonnerait qu'il vienne=m'estonariá que vengue), la crainte (j'ai peur qu'il vienne= ai paur que vengue), la concession (bien qu'il vienne= a mai vengue), ou le but (pour qu'il vienne=per que vengue)...

Voici les subjonctifs présents à la Montpelliéraine. Tout comme en Provence, on a partout des désinences en -e, ce qui est donc très simple. Ces désinences (-e, -es, -e, -em, -etz, -en) se rajoutent au radical du verbe (parl- pour parlar; rend- pour rendre). Pour les verbes du 2° groupe qui sont en -ir, on les rallonge d'une syllabe et les désinences sont -igue, -igues, -igue, -iguem, -iguetz, -igon. (La 3° personne du pluriel se prononce toujours en "ou" non accentué pour tous les verbes à tous les temps à Mtp).  

que parle
que parles
que parle
que parlem (pron. "par-lén)
que parletz (pron, "par-lés")
que parlen (pron." pàr-lou")
que legigue
que legigues
que legigue
que legiguem (pron. "létchiguén")
que legiguetz (pron, "létchigués")
que legigon (pron." létchi-gou")
 que rende
que rendes
que rende
que rendem (pron. "réndén")
que rendetz (pron, "réndés")
que renden (pron." rén-dou")

Voici ci-après la forme normative, qui s'impose peu à peu à la place de la forme "vernaculaire". Elle est un peu plus compliquée. Elle rétablit les désinences anciennes en -a aux 2° et 3° conjugaisons, qui existaient chez nous au XVII° siècle, et sont donc "classiques". Nous prenons cette norme telle qu'elle apparaît dans "le Verbe Occitan / Lo Vèrb Occitan" de Sauzet et Ubaud (1995, op cit p 81). 

que parle
que parles
que parle
que parlem  que parletz que parlen
que legisca
que legiscas
que legisca
que legiscam
que legiscatz 
que legiscan
que renda
que rendas
que renda
que rendam
que rendatz
que rendan

le subjonctif imparfait

Voici maintenant, après le subjonctif présent, le subjonctif imparfait, très vivant en occitan (contrairement au Français), qui fonctionne comme un "super-subjonctif" accentuant encore l'irréalité de ce dont on parle. 

Ce temps tel qu'il est pratiqué à Mtp est exactement la forme "normative" des documents de référence. En fait c'est très facile: la désinence est toujours le -e, marque du subjonctif, et on rajoute une syllabe ("-èss-")et la désinence devient donc: -èsse -èsses -èsse -èssem (pron. - èssen) - èssetz (pron. - èsses) - èsson... Voilà ce que cela donne pour les 3 conjugaisons régulières. 

parlèsse
parlèsses
parlèsse
parlèssem (pron. parssen)
parlèssetz (pron. parsses)
parlèsson (pron.parssou)
legiguèsse
legiguèsses
legiguèsse
legiguèssem (pron. "létchiguèssen")
legiguèssetz (pron. "létchiguèsses")
legiguèsson (pron. "létchiguèssou")
rendèsse
rendèsses
rendèsse
rendèssem (pron. "réndèssen")
rendèssetz (pron. "réndèsses")
rendèsson (pron. "réndèssou")

 

La défense:

Maintenant que nous avons vu l'impératif et le subjonctif, nous pouvons étudier la défense.  Elle ne se fait pas avec l'impératif comme en Français (parle moi de ceci, ne me parle pas de cela), mais avec le subjonctif. Exemples:    

"fais le" = "fai-o" ---- "ne le fais pas" = "o fagues pas"

"parle-lui" = "parla-ié" ----- "ne lui parle pas" = "ié parles pas"

(rappelons que "ié" doit s'écrire simplement "i", et que les normalisateurs demandent instamment de le remplacer par "li", ou au pluriel "lor")

"lis moi ce document" = "legís me aqueste document"; -- "ne lis pas ce papier" = "legigues pas aqueste papafard"...

"rend moi mon rateau" = "rend me mon rastèl"; ---- "ne me rends pas la monnaie" = "me rendes pas la moneda". 

Pour rendre la défense encore plus forte et insistante, on emploiera l'imparfait du subjonctif au lieu du subjonctif présent. 

"Surtout ne va pas faire cela"= "o faguèsses pas"; "ne t'avise pas de lui parler" = "ié parlèsses pas"; "ne vas surtout pas t'imaginer que..."= "anèsses pas t'imaginar que..."... 

"tanben"= aussi. La prononciation languedocienne, qui est celle que l'on doit adopter à Mtp, est "tabé". Toutefois la prononciation provençale "tanbèn" se trouvait aussi en usage. Dans le sens de "non plus" on dirait "tanpauc" (prononcer "tampaw"/"tampòw"). Ex: "lui non plus n'est pas venu = "el tanpauc es pas vengut". 

"aimariái" (prononcer "aymayèy"), j'aimerais. On retrouve le conditionnel étudié dans la leçon 1. Il est très facile, on rajoute la désinance -iái, -iás, -iá, etc.. après le r de l'infinitif (donc après parlar-; legir-; rendr-).  Le voici maintenant dans les 3 conjugaisons régulières. Les formes montpelliéraines sont, à l'écrit, les formes normatives. 

parlariái
parlariás
parlariá
parlariam (pron. parlayan)
parlariatz (pron. parlayas)
parlarián (pron.parlan)
legiriái
legiriás
legiriá
legiriam (pron. "létchiyan")
legiriatz (pron. "létchiyàs")
legirián (pron. "létchiyèn")
rendriái
rendriás
rendriá
rendriam (pron. "réndrian")
rendriatz (pron. "réndriàs")
rendrián (pron. "réndrièn")

A noter que dans le Bitterrois et le Lauragais on ne dit plus à la 1° personne "parlariái, legiriái, rendriái", mais "parlariá, legiriá, rendriá" comme à la 3° personne. La Gramatica d'Alibert proposait ces dernières formes comme norme. Actuellement on préconise dans la langue générale "parlariái, legiriái, rendriái" exactement comme à Mtp. (cf Sauzet-Ubaud, op cit). 

- Bondieu... O prengues pas d'aquel biais... Voliái pas te faire escòrna. Arrèsta-te de t'enfadar. 

NOTER:

"Joanon", Jeannot. La f

- E tus, arrèsta-te de me cridar dessús. Me làguias, a la fin. 

NOTER:

"Joanon", Jeannot. La f

 Bòn, e ben ieu n'ai mon cofle, ara. Aquí te quite.

NOTER:

"Joanon", Jeannot. La f

 

 - Nò, ai pas res dich. Me laisses pas solet. Que vese un tram qu'arriba, aquí. E ieu sabe pas cossí se fai per crompar las bilhetas. 

NOTER:

"Joanon", Jeannot. La f

 

- Caucanha, me'n vau. Siás pro grand per te despatolhar solet. 

 

NOTER:

"Joanon", Jeannot. La f

 

 

- Ajuda-me, tot aquò ié comprene pas res. 

NOTER:

"Joanon", Jeannot. La f

 

- Mès es pas verai. O vòle pas crèire. Sembla un cònte. Se l'aguèsse pas vist de mos uòlhs o creiriái pas.