Pèire Azemà (1891-1967)
Sa biografia per F. Gardí e F. Martèl
(en introduction (1998) de las Cronicas radiofonicas)
Mais au fait, qui est Pèire Azemà? Il est né le 3 janvier 1891, à Montpellier, dans une famille de maraîchers". Après le certificat d'études il entre comme employé à l'antenne montpelliéraine de la Compagnie des Mines de Graissessac. Il acquiert à ce moment là les rudiments d'un intérêt pour la politique : catholique, mais peu tenté par la droite, voire l'extrême droite monarchiste, c'est vers le Sillon de Marc Sangnier que son attention se tourne. Et puis, comme beaucoup de jeunes d'origine populaire qui ont acquis une culture officielle sans pouvoir se résoudre à renier leur culture d'origine, il découvre le Félibrige. C'est en 1909, - il a alors dix-huit ans - qu'en compagnie de son ami Louis Bonfils il découvre l'escola félibréenne du " Parage ", grâce à Pierre Causse. Désormais il a trouvé sa voie. Il s'engage assez vite de façon active dans la vie non seulement de son association locale mais encore du Félibrige. Au niveau de ce dernier, comme beaucoup de jeunes félibres il est séduit par Pierre Devoluy, le "capoulié de l'action" évincé en cette même année 1909. Azéma, futur historien de la crise qui amène cette éviction ne reniera jamais son dévoluyisme initial. Au niveau montpeliérain, il est on ne peut plus actif. Il se réfere à l'exemple des modèles que sont Roque- Ferrier et Tourtoulon, ou Louis-Xavier de Ricard, le théoricien du fédéralisme et le pape du Félibrige rouge. Il peut aussi connaître, de façon plus directe, les grands hommes du Félibrige montpelliérain de l'époque, François Dezeuze, l'Escoutaire, l'animateur du journal la Campana de Magalouna, et Jean Fournel. Mais il se soucie surtout de propagande félibréenne. On le retrouve ainsi aux origines de la troupe théâtrale de la "Lauseta", que nous avons évoquée plus haut, et dont le titre est un hommage à Louis- Xavier de Ricard. Significativement, les premiers succès de cette troupe ne sont pas dus à un public félibréen, mais à un public plus large, recruté dans le milieu associatif local : l'amicale des Aveyronnais de Montpellier, l'Amicale des Enfants de Montpellier, voire la Société Mutuelle des Commis et Employés". Bref, Azéma découvre très tôt qu'il est possible, si on sait trouver le bon moyen, de toucher des secteurs de la société occitane extérieurs au noyau félibréen. Mais ces débuts sont vite compromis par une catastrophe : la guerre de 1914-18. Mobilisé en 1915, il est blessé. Il faut le trépaner - il en gardera une grave séquelle, la surdité. Autour de lui, plus d'un jeune félibre prometteur perd la vie dans les combats, lancinant du même coup toute une génération qui comptait bien rénover le vieux Félibrige. Ce qu'Azéma plus tard exprimera très lucidement, en parlant de "l'esfraiousa sannada patida pèr lou Felibrige vivent e agissent de 1914, e l'inévitable anequeliment que s'en es seguit" 14. Mais il a survécu. Et il se remet tout de suite au travail. En 1916, il lance son prenùer périodique, Lou Gal, avec ses vieux complices Causse et Bonfils", rejoints par Léon Teissier ou Louis Abric. D'abord édité avec des moyens de fortune, comme beaucoup de ces journaux félibréens pour poilus dont il entend faire partie, Lou Gal passe bientôt au statut de journal imprimé. Il survivra jus- qu'en 1920. La guerre une fois finie, Azéma ne dételle pas. Il s'est fait remar- quer dans le Félibrige, ne serait-ce que par les critiques qu'il fait au fonction- nement, ou au non-fonctionnement de l'organisme, et on le retrouve en 1929 majoral, membre de ces cinquante élus (ou cooptés), qui constituent la direc- tion du Félibrige. Ce qui ne veut pas dire qu'il est assagi : il propose - en vain au demeurant, tout un programme destiné à redonner un peu de vigueur et d'impact au mouvement : contacts plus concrets entre les diverses régions occitanes, meilleure gestion des finances, et surtout, accent nùs sur la propa- gande". Il reçoit la même année la responsabilité de la "maintenance " (région, en langage félibréen) du Languedoc. Au niveau montpelliérain, il participe à la relance du " Parage ", sa vieille escòla, dont il est secrétaire, puis, à partir de 1935, " cabiscòl ", c'est-à-dire président. On le retrouve régulièrement à Montpellier à ce moment, pour des conférences sur la culture d'oc. Parallèlement, il a lancé en février 1933 une nouvelle revue félibréenne, Calendau", qui va durer jusqu'en 1942, et qui mériterait à elle seule une étude particulière. Azéma y écrit aux côtés de ses vieux arrùs devoluystes - Teissier, Abric, le Toulonnais Fontan. Il y soutient le capoulier d'alors, Marius Jouveau, il y défend les idées fédéralistes, il publie aussi - ou fait publier des études d'histoire félibréenne et des documents. Il s'y montre enfin polémiste redoutable. Il écrit aussi, et depuis 1926, dans la revue Oc, menée à Toulouse par Ismaël Girard - et ce malgré une certaine réticence vis-à-vis de la graphie dite occitane, qu'il n'utilise pas. Et il suivra avec sympathie, mais vigilance, les efforts de ces jeunes qui autour de Camproux, Reboul, Lesaffre, Rouquette, Cordes... tentent à partir des années trente l'aventure d'un nouvel occitanisme politique. Sans oublier qu'Azéma est aussi à deux reprises, en 1919 et 1935, élu conseiller municipal - et adjoint au maire - de Montpellier. Un homme actif, donc, et à l'affût de toutes les pistes qui peuvent s'ouvrir devant le mouvement occitarùste. Il ne faut pas s'étonner, dès lors, qu'il ait tôt compris l'intérêt que pouvait représenter, pour la diffusion du message félibréen, cette nouveauté appelée TSF, et que cet intérêt se soit rapidement traduit par des interventions suivies. Sans d'ailleurs que ses émissions radiophoniques reflètent directement les articles de doctrine qu'il donne dans Calendau : il est plutôt question de culture, d'une pédagogie de la proxinùté avec un public montpelliérain qu'il fallait convaincre de la capacité de l'occitan à parler de choses sérieuses, sans l'effrayer par des messages trop radicaux. La guerre ne met pas fin à cette activité. S'il participe, aux débuts de l'Etat Français, à un Comité local d'Action Régionaliste, il semble avoir pris assez vite ses distances. Ses interventions radiophoniques de 1942 et 43 sont assez représentatives de l'attitude alors adoptée par une bonne partie des Félibres : il y est question de commémorer des écrivains d'oc méritants : on aura rarement, dans l'histoire de l'occitanisme, célébré autant de centenaires d'écrivains qu'entre 1942 et 1944 ! Car l'histoire fait alors figure de refuge face à un présent décevant - les proclamations régionalistes, voire mistraliennes des premiers temps du régime, qui avaient pu séduire les félibres, ayant vite été oubliées par ledit régime. C'est donc sans surprise que l'on voit revenir Azéma sur l'antenne montpelliéraine, à la Libération, avec des émissions bien dans le ton de l'époque. Par la suite, il prend peu à peu quelque distance par rapport au Félibrige, avant de finir entre 1957 et 1959 Président de l'Institut d'Etudes Occitanes. Il meurt en 1967.
13. Lou Parage de Mount-peliè. no 16, octobre-décembre 1937, pp. 42-49, article de P. Azéma, " La Lauseta".
14. Ibidem, p. 45. 10 rq
15. Cf. René Jouveau, Histoire du Félibrige (1914-194 1), pp. 143-146.
16. Sur Calendau cf. Aicí e ara, mai 1982,"Calendau. Retrait d'una revista occitana entre las doas guèrras", un article de J. Fournié pp, 9- 18.
Tèxtes de Pèire Azemà:
a prepaus dau N° 200 de "Oc" (1956)
Omenatge a Loïs-Xavièr de Ricard
Lo diccionari clapassièr (qu'auriá pogut escriure... e qu'avèm reconstituït)
Octavian Bringuièr (1829-1875) (estudi)
Rabelais en Tèrra d'Oc (estudi)
Lo Ciclòpa (pèça antica risolièira dins lo biais d'Euripid)
Lo bèu retorn (pamflet)
A bolets roges (cronicas)
Retorn a l'ensenhador de la literatura montpelhieirenca d'òc
Retorn a l'ensenhador de la literatura dau sègle XIX
Retorn a l'ensenhador generau